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Photo du rédacteurChristian B.

Vendredi Saint à Trapani #2

Dernière mise à jour : 24 févr. 2023

Depuis le XVII° siècle, des statues de taille humaine remplacent durant la Semaine Sainte les scènes vivantes de la Passion improvisées autrefois. Chaque scène, comportant plusieurs personnages, est fixée sur une vara ( une plateforme à brancards ) portée en procession par six, dix, douze ... hommes d'un même ceto ( corporation ) : les cordonniers, les menuisiers, les bouchers, les mariniers,...

Depuis des générations, les pastai ( fabricants de pâtes ) ont la responsabilité du sépulcre du Christ dans un cercueil de verre, les pescivendoli ( les poissonniers ) s'occupent du char « Jésus devant Hérode », etc.

Les personnages des varas sont en cyprès, les parties « nues » ( visages, mains, parfois bras, torses et jambes ) étant en liège. Certains « tableaux » sont tragiques comme ce Christ tuméfié, sanguinolent et les yeux révulsés, ces bourreaux qui inspirent la haine ; d'autres sont théâtraux comme l'Ecce Homo derrière sa balustrade en argent.

Le poids de chaque vara est conséquent, plusieurs centaines de kilos m'a-t-on confié et j'ai vu des porteurs grimacer sous l'effort. Aussi, les varas ne parcourent-elles qu'une centaine de mètres puis un maître d'œuvre fait tourner une crécelle donnant l'ordre aux porteurs de stopper ; nouveau tour de crécelle et les porteurs déposent la vara. À ce rythme là, on comprend aisément que la procession mette des heures à parcourir la ville.

Pour mimer la vie, les porteurs impriment aux varas un mouvement de balancier régulier appelé cannacata.

Les membres des diverses corporations qui ne portent pas entourent leur vara avec insignes de leur fonction, décorations ou fanions. Généralement, hommes et femmes sont en costume ou tailleur noir, mais certaines professions se parent de ridicules tenues de légionnaires romains et plus grotesque encore parfois d'anges !

Toutes les varas sont suivies d'une fanfare - elles ont été réquisitionnées dans toute la provincia - et elles jouent toutes le même air tragique, lancinant.

Il y a cependant une exception, la vara du Ceto dei Fornai ( boulangers ) est suivi d'une imposante cohorte d'enfants de la ville, âgés huit à dix ans, portant casquette bleue, anorak blanc ou quelques fois bleu, ils ne chantent pas, ils scandent le même air. Ça prend aux tripes !

Une autre exception, la vara du Ceto dei Camerieri - Baristi - Pasticieri ed Affini ( serveurs - barmans - pâtissiers et similaires ) est précédée d'un cortège de femmes en grand deuil ( robe ou tailleur noir, tête recouverte d'un fichu, parfois pieds nus ). La vara représente la Madonna Addolorata ( la Vierge des Sept Douleurs ), bardée de poignards et vêtue d'un manteau garni d'ex-votos, ferme toujours la procession.

Le lendemain matin, je suis revenu en ville prendre quelques photos supplémentaires de cette Processione dei Misteri qui se renouvelait en un autre endroit de la cité et puis, j'ai quitté Trapani pour filer vers Piana degli Albanesi à 30 kilomètres au sud de Palerme où des fêtes religieuses sont célébrées en costumes traditionnels à l'occasion de Pâques...


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